Photographie de la nouvelle salle de conférence internationale du Ministère des Affaires étrangères bâtie par une société chinoise, Abidjan, le 17 février 2009.
Photographie du centre d'acuponcture chinois de Wang Jian Min et de sa femme, Boulevard Latrille vers Aghien. Abidjan, le 2 mars 2009.Après un mois et demi en Côte d'Ivoire, État politique en reconstruction et socialement divisé, mes impressions sont multiples. Du point de vue strictement scientifique, ma recherche fut laborieuse. La coopération des officiels ivoiriens fut rare. La bureaucratie, la corruption à tous les niveaux administratifs et politiques, la suspicion quant au sujet d'étude et à ma présence furent de réels freins au bon déroulement des entretiens, des prises d'informations... Les documents officiels recueillis sont pour ainsi dire inexistants. Seuls quelques responsables m'apportèrent leur appui, et ce à la condition de ne pas être cités dans la thèse finale. Du côté chinois (ambassade et bureau économique et social), même son de cloche. Démagogie, suspicion, aucune volonté de coopérer à ma recherche, impossibilité d'obtenir un entretien avec les responsables des différentes représentations chinoises.
Un certain sentiment d'amertume, de non-achevé ressort donc de cette troisième étude de terrain sur le sol africain, après le Sénégal (2007), le Mali et la Mauritanie (2008), où, les données et infos reçues furent autrement plus précieuses et faciles à obtenir. La présence française, qu'elle soit économique, politique ou universitaire (rare) est encore perçue de manière négative. S'ils le reconnaissent eux-mêmes, ces barrières ont donc dans les faits largement altéré sur l'étude de terrain et ses résultats directs.
Ceci étant dit, quelles sont les premières conclusions? A l'image des autres États étudiés, la Chine Populaire comme ses ressortissants "individuels" et ses sociétés publiques et privées sont implantés sur le territoire ivoirien. Plus précisément, à Abidjan, capitale économique et administrative et à Yamoussoukro, actuelle mais dans les faits, future capitale politique. Économiquement, la RPC se classe au troisième rang des fournisseurs de la C.I. en 2007 (209 milliards de FCFA), au 35e rang des pays clients (18 milliards de FCFA). Plus que ces données - devant être affinées et surtout évaluées sur le temps long: de 1996 à 2007 - de fortes similitudes avec les trois États cités apparaissent.
Les produits
made in China sont omniprésents, tant à l'intérieur que sur la façade maritime. Les grandes sociétés du BTP, des Télécommunications sont installées et obtiennent des contrats, en grande majorité dans le cadre d'aides liées, une constante en Afrique subsaharienne - ce n'est pas l'exclusivité de la RPC, la France par exemple en ayant largement abusé également.
La France donc, premier partenaire de la C.I., se voit refuser des contrats "promis" (ex: troisième pont par Bouygues), en net retrait de la vie économique locale.
Comme ailleurs, les restaurants, maquis et centres de massages chinois apparaissent, géographiquement dispersés et couvrant l'ensemble des quartiers et villes périphériques d'Abidjan (II plateaux, zone III et IV, Vridy, Yopougon, Cocody...). Les détaillants et grossistes individuels sont eux concentrés en majorité à Adjamé, quartier populaire et marché central de la Côte d'Ivoire où une majorité "d'étrangers" (comprendre Mauritaniens, Burkinabés, Maliens, Guinéens...) sont installés. Ces huaqios remplacent petit à petit l'autre communauté historiquement implantée dans le commerce, celle des Libanais. Une comparaison avec la situation dakaroise est donc possible dans une certaine mesure, ces commerçants chinois n'étant pas encore organisés en un
Chinatown ou
Chinamarket.
Reconnue en mars 1983, la République Populaire de Chine s'efforce donc de devenir un partenaire privilégié de la R.C.I.
Un moment implantée dans le domaine des énergies (pétrole et mines), la Chine au sens large investit aujourd'hui dans l'agriculture (riziculture), le bâtiment, la pêche (nombreux conflits), la restauration, l'import-export, les grands projets de la R.C.I. par exemple dans le cadre du transfert des infrastructures politiques à Yamoussoukro ou dans le projet de développement stratégique "Le grand Abidjan". Également, les domaines de la Santé, de l'Education.
Ces premiers éléments de réponse seront par la suite étayés, après la période indispensable de "digestion" des informations et données recueillies lors de l'étude de terrain ivoirienne, du 5 février au 16 mars 2009.